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Notes historiques détaillées sur les anciens propriétaires successifs du château de Vierville

Voir le tableau généalogique        Résumé de l'histoire du château de Vierville

Les Vierville  - La famille qui a possédé le château de Vierville-sur-Mer des origines à 1523.

Dès le milieu du Moyen Age vivait à Vierville une famille qui semble n'avoir eu d'autre nom que celui de cette localité. La seigneurie de la paroisse était partagée en 1165, entre Raoul d'Aigneaux, Robert de Ver et Guillaume de Vierville, fils d'Edouard de Vierville.

Nicolas de Vierville, seigneur de Vierville et Louvières, vivait en 1173 et 1181, son petit-fils s'appelait Richard de Vierville, dont le fils Guillaume de Vierville a combattu avec Philippe le Hardi à Foix en 1272.

En 1340, la garde des frontières de mer comprenait les chevaliers Richard, Guillaume et Jean de Vierville. L'écusson de ces de Vierville était "d'argent à trois faces d'azur, à la bande de gueules brochant sur le tout"

Richard de Vierville vivait en 1354 et en 1374, marié avec Isabelle, (Isabeau) de Tillères, il a eu 2 fils dont Guillaume de Vierville qui est devenu baron de Creully (en 1397) après son mariage en 1392 avec Marie de Creully. Pendant la guerre de Cent Ans, il demeura fidèle au roi de France (en 1411, il était qualifié "Chambellan du Roi") et fut dépossédé de ses biens au profit de l'Anglais Hortant de Vanox.


Un manuscrit de 1366, qui cite le seigneur de Vierville (non déchiffré)

Archives du Calvados
Baronnie de Creully

Extrait de "barons de Creully"
1371-1501


Guillaume de Vierville a eu plusieurs enfants :        1 - Jean de Vierville
                                                                          2  - Philippe, sire de Vierville, baron de Creully, qualifié en 1451 de conseiller et chambellan du Roi, marié le 22 janvier 1433 à Marie de Montauban ( fille de Robert de Montauban et de Marie de Saint Deurnal - Bretagne), et en seconde noce à demoiselle Suhart.
                                                                          3  - Jeannette de Vierville, mariée en 1412
                                                                          4 -  ? Thomine de Vierville, mariée vers 1451?
Le domaine de Vierville, y compris celui du Vast, près de Saint-Pierre-Eglise (où se trouve actuellement l'autre commune du nom de Vierville, dans le Cotentin), était l'apanage de Philippe de Vierville. Au début du 15ème siècle, lors de la reprise de la Guerre, ce domaine a été à nouveau confisqué et donné à Jean de Heyne, à charge de verser cent francs par an et d'offrir un fer de lance an roi d'Angleterre en hommage.

La victoire de Formigny (en 1450) a fait rendre leurs terres aux de Vierville, mais leurs châteaux avaient beaucoup souffert. De celui de Vierville subsistait alors seulement la très élégante tourelle (détruite en 1944) dont on aperçoit la base près du château actuel, quelques éléments du mur d'enceinte Est, et peut-être le pigeonnier situé dans la cour de ferme du château. Il n'a plus son toit, mais conserve à l'intérieur tous ses boulins, trous où nichent les pigeons. Il y en aurait au moins 365, chiffre proportionnel à la surface exploitée dans le domaine, probablement très importante.

Philippe de Vierville a eu un fils Arthur de Vierville, qualifié en 1477, écuyer de l'écurie du Roi, marié à Jacqueline de Bricqueville

Ainsi que le dit M. de La Heudrie en son 1er volume, (Histoire du Bessin, page 279) " Philippe et Arthur de Vierville ont fait grande figure durant 15ème siècle".

Arthur de Vierville (marié à Jacqueline de Bricqueville) n'ayant laissé que des filles, dont deux se sont faites religieuses, les deux autres se sont partagés les biens paternels en 1502:
             Jacqueline de Vierville, mariée à Charles d'Harcourt, Baron de Beaufour et de Beuvron, qui eut les terres de Creullet, Vienne et du Manoir. Leur succession a été partagée entre 3 fils d'Harcourt.
         et Marie de Vierville, baronne de Creully, mariée à Jean de Sillans, Chevalier, seigneur d'Hermanville, qui eut la partie principale dela baronnie de Creully, y compris le domaine de Vierville-sur-la-Mer

Les Bailleul - propriétaires de 1523 à 1569

         2 données se complètent:
1 -   "En 1516, cession par Jean de Sillans et Marie de Vierville, d'une clameur lignagère par eux faite de la terre et seigneurerie de Vierville, décrétée et adjugée à Gaston de Sérocourt, écuyer, sieur de la Tour", évènement difficile à interpréter.
2 -   Marie de Vierville a vendu, en 1523, son fief de Vierville ("sur la mer") à la famille de Bailleul, qui a donné au moins deux prêtres en ce 16ème siècle, dont Michel de Bailleul, qui mourut le 24 mai 1536 "le jour de la foire des Rouaisons (rogations)". Jehan Canivet, en donnant cette précision, nous apprend que l'autre prêtre," Guillaume de Bailleul, en son vivant escuyer, prestre curé de Vierville et seigneur de ce lieu, de Louvières et autres terres nobles, alla de la vie à trépas le 1er août 1569."

Peu de temps après, Pierre Le Bailleul était qualifié sieur de Vierville et d'Engranville; il donna la main de sa fille Françoise à Guillaume Canivet, anobli par François 1er en mars 1543 et qualifié sieur du Vaumicel en 1551. Dix ans plus tard, les Canivet étaient seigneurs de Vierville (à la mort du curé-seigneur Guillaume de Bailleul en 1569).

Quant aux de Vierville, voici ce qu'en dit M. de la Heudrie:

"Plus modeste est François de Vierville, seigneur de Tour, Vierville (du Cotentin) et Louvières en 1540"

Bien sûr les Vierville ne possédaient plus leur fief du Vierville-sur-la-mer du Bessin vendu aux Bailleul à cette époque.
L'an 1598 voit partager la succession de François de Vierville entre ses trois enfants : François (2ème du prénom) a la baronnie de Creully, Isambart la seigneurie du Vast (le Vierville de la Manche) et Gislette le fief de la Motte. Nicolas de Vierville, fils d'Isambart, meurt sans enfants et son neveu, Pierre, meurt le 17 septembre 1665 après avoir vendu ses biens pour se constituer une rente viagère. Il avait épousé, Marguerite de Mons, qui lui survécut jusqu'en 1675 et fut inhumée le 25 janvier dans l'église du Vast. Mais rappelons que Pierre de Vierville n'avait plus rien à Vierville-sur-Mer dans le Bessin.

Le château de Vierville, construit à Vierville dans le Cotentin, vers la fin du 17ème siècle, comme celui reconstruit à Vierville dans le Bessin

Les descendants de Pierre de Vierville, qui étaient protestants, ont quitté la France lors de la Révocation de l'Edit de Nantes par Louis XIV en 1685. Plusieurs branches au moins ont subsisté jusqu'à nos jours.

Une première branche a dû partir en Allemagne, et aurait germanisé son nom en Wierwille (en allemand le W se prononce comme le V en français). On trouve trace de Wierwille en Westphalie, à Lautbergen et Ladbergen.
Une branche a apparemment émigré aux Etats-Unis, peut-être dès 1793 (Heinrich H. Wierwille). Cette branche a pour descendants une Sophia Wierwille mariée à un Katter, puis une Katter mariée à un Armstrong d'où serait issu Neil Armstrong, celui qui a marché sur la Lune.
Dans une autre branche Américaine on a noté un Nathan Benjamin Wierwille parents d'un Jonathan P. Wierville de Cincinnatti (Ohio).
plus récemment des Wierwille sont revenus à Vierville sur Mer visiter le domainede leurs ancêtres du Moyen Age.

Une autre branche serait partie en Suisse et aurait conservé l'orthographe Vierville en Suisse alémanique: Marcel Vierville-Roth, père de Angélique Vierville-Roth (à Rein par Brügg) et de Frau Renata Fehner, née Vierville-Roth, à Rifferswill (Zürich).

Enfin une 3ème branche aurait été identifiée, issue de la fille de Pierre de Vierville, Marie de Vierville, mariée à Claude Champion de Crespigny (un domaine situé non loin du château de Vierville). Cette branche a émigré à Londres et ses descendants ont visité Vierville dans les années 30. (voir l'histoire du domaine de Crespigny)


1972 : Un couple américain vient se marier à Vierville. Il porte le nom de Wierwille et il descend des anciens chatelains

 

 

 

 

 


Les Canivet. - La famille qui posséda le château de 1569 à 1670.

            Anoblis en mars 1543, les Canivet portaient: "de gueules à trois canifs à tranche d'argent emmanchés d'or".
            On retrouve des branches nombreuses de cette famille établie à cette époque dans toute la contrée (Canivet du Molay, Canivet de la Rougefosse, Canivet des Londes, Canivet du Taillis, Canivet de Glondelle, etc.).

Guillaume Canivet, marié en 1553 avec Françoise de Bailleul, fille du seigneur de Vierville était aussi seigneur de Vaumisset. Ils ont eu 7 fils dont 3 seulement semblent avoir eu de la descendance et hérité:

1° - Michel Canivet, qui a hérité de Saint Sever

2° - Jehan Canivet, 1er du prénom, a été le sieur du Vaumissel et du Molay, et a épousé Madelaine de Hotot, dont la famille possédait le château de Beaumont-le-Richard. Bien qu'il n'ait pas hérité de Vierville, nous allons suivre sa descendance car elle recoupe celle de son frère Marin Canivet qui a hérité de Vierville.
Jean 1er Canivet a écrit une chronique "des choses qu'il voyait ou entendait dans la région".

              En ce "Journal de Jehan Canivet", visible aux archives du Calvados, on lit par exemple que le 16 février 1503, François de Bricqueville-Colombières et le sieur de Pierrepont vinrent assiéger Bayeux avec quatre canons; on y parle de Jehan d'Escageul, seigneur de la Bretonnière (à la Folie), époux de Jacqueline d'Harcourt, député de la noblesse du Bessin aux Etats de Blois en 1588, gouverneur de Bayeux en 1589, etc.

              Jehan Canivet, commence cette chronique manuscrite par ces mots :

" Journal des héritages, rentes et revenus de Louis et de Jehan Canyvet, seigneurs du Vaumisset... "

               Il mentionne les événements et les décès qu'il apprend en ce manoir, de 1562 à 1606... Partisan de Henry IV, même avant son abjuration, il se montre victime des troubles des guerres de Religion en ces termes :

" Je fus volley et brusley des (par les) gens de Vicques le mercredi, penultième jour d'août 1589, et meney prisonnier au mont Saint-Michel et y demeurey jusqu'à sa prise le 5 décembre 1589 par M. de Lorge, fils de M. de Montgommery. "

              On sait que Vicques, s'intitulant " lieutenant-général de la Sainte-Union en Basse-Normandie " était Louis de Lamoricière, sieur de Vicques, de l'Isle-Manière. L'année suivante, celui-ci se vit attaqué près d'Avranches par les royaux ayant à leur tête Carbonel de Canisy et Jean de Hotot, sieur de Beaumont, appelé souvent le "capitaine de Beaumont" dans les écrits contemporains, et beau-frère de Jehan du Vaumisset. La bataille eut lieu le 8 août, près Saint-Jean-de-la-Laize. Mais, abandonnés par d'anciens ligueurs qu'ils avaient enrôlés malgré eux, Jean de Hotot et Carbonnel de Canisy durent battre en retraite en laissant deux cents morts et cent blessés. Le 30 août 1590, Jean de Hotot fut chargé de la garde des côtes de la mer depuis Isigny jusqu'à Bernières-sur-Mer, ce qui rétablit la sécurité au Vaumisset et dans les environs.

               Dans son journal, Jehan Canivet note que sa fille, Catherine, née en 1575, fut baptisée par le curé de la 2ème section d'Englesqueville et eut pour marraine Marie du Bosq, assistée par Jean de Baudre. Il note aussi que la fille de celle-ci, Madeleine de Hotot, sa chère épouse, mourut et fut inhumée le 6 mars 1585 dans l'église de Vierville.

 

           Jean 1er Canivet put réparer le Vaumissel "brûley par les ligueurs" et laisser un bel héritage à son fils Gilles 1er, né en 1578, trois ans après sa soeur, Catherine, et cinq ans avant la mort de leur mère, Catherine de Hotot.

           Gilles 1er Canivet, surnommé l'Aîné, fit reconnaître sa noblesse en 1599, âgé de 21 ans. Toutefois, après la mort de Henri IV, il fut considéré comme ayant dérogé et dut se faire réintégrer dans la noblesse par lettres données à Saint-Germain, le 14 octobre 1625, et enregistrées le 9 décembre. Cependant, qualifié seigneur du Vaumissel et du Molay, il avait pu contracter, dès 1621, une très noble alliance en épousant à La Cambe, Marie de Faoucq, fille du seigneur de Jucoville, Jacques 1er de Faoucq-Rochefort et d'Olive de la Luzerne, constructeurs du beau portail de Jucoville, toujours visible.

           Du mariage de Gilles 1er et de Marie de Faoucq, naquirent une fille et cinq fils, dont Jacques qui fut seigneur des Londes, et Jean II, seigneur du Vaumissel après la mort de son père. En avril 1660, Jean II Canivet, consentit à vendre son bois du Vaumissel à Gilles du Mesnil, seigneur de Saint-Paul " onze cent dix livres pour faire bastir une maison en la paroisse de Cricqueville, dans une pièce de terre appelée les Closets ". (Extrait d'un manuscrit rédigé par Jacques du Mesnil Saint-Hilaire et conservé à Couterne).

            Jean Il, reconnu noble par Chamillard en 1666 en même temps que son frère Jacques, seigneur des Londes, mourut en 1679 et fut inhumé le 12 novembre " en la chapelle Saint-Loup, sise au côté méridional de l'église de Louvières où il avait fondé la confrérie du Rosaire " dit son acte d'inhumation.
Il laissait sa veuve Robine Philippe qui fit enregistrer en 1698 à l'Armorial de France l'écusson des Canivet.

             L'épouse de Jacques Canivet, Anne Léonard, de la famille des sieurs de Beaupré, des Isles, de Rampan et de Juvigny, fut inhumée aussi à Louvières, le 27 juin 1680.

             De son mariage, Jean II laissait un fils, Guillaume, qui lui succéda comme seigneur du Vaumissel et du Molay et qui épousa la veuve de Gilles de Marguerye et l'héritière de la seigneurie de Vierville, Marie-Thérèse Canivet-Maillard.

3° - Marin Canivet, héritier de Vierville et de Lormel, a été le père de Gilles Canivet le Jeune, Sgr. de Vierville et Lormel, marié à Marie Maillard qui lui a apporté le fief de Léaupartie.

        Gilles et Marie Canivet-Maillard ont eu au moins 2 héritiers:
             - Gilles Canivet, sieur de la Rougefosse (un domaine à Englesqueville, dont il reste un vieux manoir du 16ème siècle, 300m avant le château d'Englesqueville sur la route de Grancamp), dont les descendants directs portent encore le nom.

          et - René Canivet, seigneur de Vierville, Lormel et Leaupartie, né vers 1616, et qui a épousé Charlotte Simon. Ce sont probablement eux et leur fille qui ont construit le château de Vierville sous sa forme actuelle.

              Leur fille Marie-Thérèse Maillard-Canivet, héritière de Vierville et Lormel, avait gardé le nom de sa grand-mère, peut-être parcequ'il y avait beaucoup de Canivet dans le Bessin et que les confusions étaient trop nombreuses.

             Elle s'est mariée 2 fois, d'abord avec un de Marguerye, puis avec un cousin Canivet éloigné, le seigneur du Vaumisset:

1° - Premier mariage le 8 octobre 1670, avec Gilles de Marguerye, fils de Bernardin de Marguerye, seigneur de Colleville, et de Renée de Méhérent, (Archives municipales de Vierville, registres curiaux).
Ils ont laissé un fils Gilles-Armand de Marguerye, qui a hérité de Vierville.

2° - Ensuite, Marie-Thérèse Canivet-Maillard, veuve de Gilles de Marguerye, s'est remarié en 1685 avec Guillaume Canivet, son cousin, seigneur du Vaumisset. Elle en eut 2 enfants qui se partagèrent les biens des Canivet:
           - Isaac-François Canivet, seigneur du Vaumissel et du Molay,
       et - Jean-Louis Canivet, seigneur de Vacqueville. Celui-ci fut capitaine garde-côte et chevalier de Saint-Louis; il donna 140 livres de rentes aux malades pauvres de l'Hôtel-Dieu de Bayeux en 1728 sur ses biens personnels;

Une obscure histoire de droit de gravage sur la côte,
disputé entre Marie-Thérèse Maillard-Canivet  et  les du Mesnil de Louvières
.

          Voici l'acte de procuration qu'enregistre le 14 décembre 1693, avant midi, le notaire de Trévières, Magloire Tortonne :

             "Fut présente noble dame Marye-Thérèse Maillard, épouse de Guillaume Canivet, esc., sieur du Mollay, d'avec luy civilement séparée de biens, dame et patronne de Vierville, demeurant en son manoir seigneurial du dit lieu de Vierville, laquelle a passé procuration générale et spéciale au sieur du Mollay son mary, aussi présent auquel elle a donné plein pouvoir, puissance et autorité, pour elle et en son nom agir et négocier en toutes ses affaires générales et spécialement poursuivre le procès par elle intenté à l'encontre d'Adrien de la Rivière, escuier, sieur de Romilly, pendant au siège de l'Admirauté de Grandcamp, au subjet de plusieurs gravages eschoués sur la coste de la mer, ensemble bailler à ferme ses héritages à quelques lieux qu'ils soient situés,... recevoir les paiements des arrérages des rentes foncières, seigneuriales et hypothèques, généralement tout ce qui peut lui être deub pour quelques affaires que ce soit ; comme aussi de faire termer et tenir les pieds des fiefs à elle appartenant, recevoir les déclarations et adveux des hommes et vassaux qui en relèvent, blasmer s'il voit que bon soit, et en cas de procès ou oppositions comparoir pour elle et en sa personne, représenter en toutes cours et juridictions devant tous, juges qu'il appartiendra ; pour cet effet fonder procurer et advocats, écrire, produire, recuser, opposer, appeler, prendre à partie, transiger et appointer de tous procès et différends, et généralement dire, faire, gérer et acheter tout ce que le dit sieur mari jugera à propos, sans qu'il soit besoin d'autre pouvoir plus général ou spécial... "

         Fait et passé en l'étude. Signé : Marie-Thérèse Maillard, dame de Canivet: Témoin : Jean Pouchin, de Mandeville ; Richard Carité, de Trévières.

          Cette procuration de Mme de Vierville est assez instructive des chicaneries normandes de cette époque.
          D'abord le régime de la séparation de biens n'empêchait pas "Marie-Thérèse Maillard" d'avoir pleine confiance en son mari, Guillaume Canivet.
          Elle devait d'une part sauvegarder les intérêts des fils qu'elle avait de son 1er époux, Gilles de Marguerie, fils de Bernardin, seigneur de Colleville, et de Françoise-Renée de Meherent.
          Quant aux gravages échoués sur la côte, ils appartenaient en 1604 au possesseur du fief Vierville-Fontenay.

           D'après le Journal des héritages, rentes et revenus des Canyvet, dans la succession de Guillaume de Bailleul, en 1569, ce droit de gravage fit partie du 2ème lot échu à Robert du Mesnil, fils de Tristan et de Catherine Bailleul. D'autre part, nous savons que ce droit passa à Guillaume du MesniI, fils de Robert, puis à Jean, époux de Marie de Saint-Denis, d'après son aveu de 1604, et enfin à leur fils, Jacques du Mesnil, habitant Vierville bien que seigneur de Louvières.

            Mais le 1er lot comprenant les droits et libertés de la seigneurie de Vierville avec son patronage et son droit de présentation du curé avait été adjugé à Guillaume Canivet, époux de Françoise de Bailleul, et leurs descendants directs avaient joui du droit de gravage sur Vierville.

             Marie-Thérèse Maillard-Canivet réclamait le même droit sur Louvières, se disant suzeraine du fief noble de Louvières-Fontenay et du patronage de la première et principale portion de la cure de Louvières (il y avait 3 curés à Louvières), elle prétendait qu'en vendant le fief-noble de Louvières, l'an 1669, à Adrien de la Rivière, Gilles Canivet, son grand-père, en avait gardé la suzeraineté: d'où le procès que l'amirauté de Grandcamp n'avait pas encore réglé six mois après la procuration donnée à Guillaume Canivet le 14 décembre 1693 par son épouse.

Celle-ci, Marie-Thérèse, d'après l'acte notarié àTrévières, habitait en 1693 le manoir seigneurial de Vierville, c'est-à dire le château nouvellement construit.

 

           Isaac-François Canivet, en possession de la terre de Mauminot, sise partiellement, à Aignerville, la vendit 2.000 livres à Gilles-Armand de Marguerye, châtelain de Vierville.

           Selon l'usage d'alors, les deux frères Canivet, Isaac-François et Jean-Louis, étaient restés propriétaires indivis du Vaumisset et de la Vacqueville. Or, par contrat du jeudi 7 août 1755, devant Michel Duhamel, notaire royal et héréditaire à Bayeux, ils vendirent le Vaumisset et Vacqueville à Jean-Nicolas de Pleurre, conseiller honoraire en la Grande Chambre du Parlement de Paris.

           Jean-Nicolas de Pleurre, paroissien de Saint-Sauveur, à Paris, était seigneur de Romilly et de la Ferté ; il avait épousé Marie-Thérèse Gaillard qui lui avait donné une fille, Marie-Thérèse de Pleurre, qui s'est mariée en 1741 avec Gilles-Edouard de Marguerye, qui était Sgr. de Vierville.

            Vierville et le Vaumisset se trouvaient donc réunis à partir du décès de Jean-Nicolas de Pleurre et jusqu'en 1809.

Les Marguerye à Vierville de 1670 à 1809 et de 1829 à 1836

           Le 8 octobre 1670, Gilles de Marguerie, fils de Bernardin de Marguerie, seigneur de Colleville, et de Renée de Méhérenc, épousait Marie-Thérèse Canivet-Maillard, héritière de Vierville (Archives municipales de Vierville Registres curiaux).
            Ils ont laissé un fils Gilles-Armand de Marguerye (+1738) et c'est ainsi que les Marguerye sont devenus seigneurs de Vierville.
            Gilles-Armand se maria avec Jeanne Hélyes de Clinchamps .
De ce mariage est né en 1709 Gilles-Edouard de Marguerye (+1802), sgr. de Vierville et de Lormel, marié en 1741 avec Marie-Thérèse de Pleurre, héritière du Vaumisset.

  A Vierville se trouve la tombe de Gilles-Armand:

" ICI REPOSE LE CORPS DE MESSIRE GILLES ARMAND DE MARGUERYE CHEVALIER SEIGNEUR ET PATRON DE CETTE PAROISSE SEIGNEUR DE MONMINOT, HOUTEVILLE, ET AUTRES LIEUX DÉCÉDÉ LE 31 DÉCEMBRE 1738 AGÉ DE 65 ANS PRIEZ DIEU POUR LE REPOS DE SON AME."


Les tombes des 2 familles : de Marguerye et de Marguerit de Rochefort, au cimetière de Vierville

            Les Marguerye portaient d'azur à trois marguerites d'argent, œillets d'or, tigées et feuilles de sinople , qui sont devenues ultérieurement : d'azur à trois marguerites des prés d'argent, posées 2 et 1.

            De Gilles Edouard de Marguerye et de Marie-Thérèse de Pleurre citons trois enfants:

1° - Jean-Edouard de Marguerye, marié à Louise de Viel et mort le 3 août 1783 ainsi qu'on le voit sur sa tombe au cimetière de Vierville
"Cy devant au pied de la Croix Repose le corps de Jean Edouard de Marguerie Chevalier, fils de Gilles Edouard de Marguerie, chevalier, seigneur et patron de cette paroisse, décédé Le III Août MDCCLXXXIII Agé de XXXXII ans Priez pour lui
La tendresse de noble dame Louise-Françoise-Thérèse de Viel de Lunas son épouse a posé ce monument"

2° - Françoise de Marguerye, qui épousa Joseph Morin de Litteau (sgr. de Vaulaville); et qui seront propriétaire de Vacqueville

3° - Edouard-Marie de Marguerye, colonel, victime de la Révolution (+2 juin 1794).

               Le lieutenant Edouard-Marie de Marguerye s'était marié à une noble Ecossaise, Anna-Bella Drummond de Melfort, dame d'honneur de Mme Elizabeth, soeur de Louis XVI.
               Devenu Colonel de la garde royale, Edouard de Margerie était près du Roi le 10 août 1792.
               Voyant Louis XVI condamné, M. et Mme de Marguerie durent émigrer, mais revenu voir ses enfants confiés à son père, châtelain de Vierville, le colonel fut averti de son arrestation imminente, dans sa résidence d'Agy.
               Il tarda à fuir, voulant revoir ses enfants. Arrêté, condamné le 12 prairial an II (2 juin 1794), il fut guillotiné à Paris, place de la Révolution.

               Il avait écrit une touchante lettre à son fils, Edouard-Marie-Alfred et à sa fille, Anne-Marie, qui épousa, le 31 mai 1802, Eugène Texier, comte de Hautefeuille. Officier sous l'Empire et la Restauration, le comte de Hautefeuille était colonel de dragons en 1823. Il commanda la 1ère subdivision de la 14ème division à Caen, et fut promu maréchal de Camp et officier de la Légion d'honneur.

              Cependant, son épouse s'inspirant parfois de Vierville et de ses tombes, écrivait en prose et en vers: "Malheur et sensibilité", "Souffrances", "Léa Cornelia", "L'âme exilée", "Le lys d'Israël", "Fleurs de tristesse". Voir l'article de la Renaissance à ce sujet et les textes relatifs à Vierville. Au sujet de ses écrits politiques, voir "Châteaux et chaumières"

Edouard-Marie-Alfred de Marguerye hérita du château de Vierville à la mort de son grand-père en 1802 (partage de 1805). Il mourut en 1809, et le château de Vierville, fut vendu à Mme de Marguerit de Rochefort.

Les Marguerit de Rochefort, propriétaires de 1809 à 1829

            En 1809, Madame de Marguerit de Rochefort, au manoir de Than, se constituait ainsi un domaine destiné à son fils Louis-Victor-Frédéric afin de permettre à sa fille Marie-Félicité-Constance-Aimée de Marguerit de Rochefort de garder seule le domaine de Than. Mais Louis-Victor mourut avant elle en 1816 et Marie Félicité Constance Aimée de Marguerit de Rochefort a hérité de Vierville en 1829.

            Comme elle s'était mariée en 1798 avec un cousin de la famille de Marguerye, Jacques-Henri de Marguerye (+1836)(Archiv. municip. de Vierville), le château de Vierville, passé en 1809 des mains des Marguerye (de Vierville) entre celles des Marguerit de Rochefort (de Than) retourna par cette alliance aux Marguerye en 1829. Le domaine de Than, lui, est resté aux mains des hériters des Marguerit de Rochefort jusqu'en 1938 par vente aux parents de Thérèse Chedal-Anglay).

           Marie-Félicité-Constance-Aimée de Marguerit de Rochefort et Jacques-Henri de Marguerye ont eu une fille Jenny de Marguerye, héritière de Vierville.

Les Lépesse, propriétaires de 1836 à 1876

              Le mariage en 1822 de Jenny de Marguerie avec Adrien-Bon-Casimir Sorin de Lépesse (Archiv. municip. de Vierville) fit passer le château et le domaine dans la famille de Lépesse à la mort de Jacques-Henri de Marguerie en 1836.

Fils d'une victime de la révolution, Adrien Sorin de l'Epesse (ancienne famille tirant son nom du fief de l'Epaisse, sis à Sainte Opportune près de Lessay) s'engagea dans l'armée de Napoléon; sous-lieutenant à 18 ans, il était capitaine le 1er février 1800, deux mois avant d'avoir 21 ans. Il s'est battu en Prusse, en Suède, en Russie.

            Adrien-Bon de Lépesse naissait le 2 Avril 1788 et s'engageait si jeune dans les armées de Napoléon 1er qu'il fut sous-lieutenant à 18 ans, lieutenant le1er novembre 1808, capitaine le 1er février suivant, 2 mois avant d'avoir 21 ans. Il fit les campagnes de Prusse, de Suède, d'Allemagne, des bords de l'Océan (1807 à 1811), de Russie (18I2-1813). Blessé à l'épaule gauche il continua d'encourager ses voltigeurs par son exemple. Il se distingua surtout à la Bérézina et reçut la croix de la Légion d'honneur le 24 juillet 1813. Démissionnaire en 1815 il fut réintégré dans son grade à la 1ère légion de la Manche en décembre 1815, puis au 25ème de ligne en 1821.

            Rentré dans la vie privée il habita Vierville. " Fidèle au serment qu'il avait prêté en 1814, à la monarchie et à la dynastie pour laquelle son père avait versé son sang, il refusa en 1830 de prêter un nouveau serment comme membre du conseil municipal de Vierville; en 1848 après l'abolition du serment, il fut de nouveau porté au conseil municipal dont il se retira encore par refus de serment en 1853, après la proclamation de l'Empire. " Nous empruntons ces lignes à la notice publiée par l'Association normande en 1858, notice disant qu'Adrien de Lépesse " fut enlevé le 28 Avril 1857 presque subitement à l'affection d'une famille dont il faisait le charme et le bonheur, aux nombreux amis qu'il s'était attirés par la loyauté, la douceur et l'aménité de son caractère..., dans les sentiments de la profonde et sincère piété qu'il pratiquait sans dissimulation comme sans ostentation. "

             Adrien-Bon de Lépesse était le fils de Pierre-François-Casimir Sorin, sieur de Lépesse (autrefois l'Espaisse, nom d'un fief de Ste Opportune près de Lessay).

             Marié et père de famille, Pierre-François avait 45 ans lorsqu'il fut la victime d'une des plus cruelles injustices de la Terreur. En effet il avait simplement contre lui d'être "fier et ex-noble", car à maintes reprises il avait donné des preuves du civisme le plus rationnel.

             La malchance voulut que son frère, l'abbé Sorin de Lépesse, prêtre réfractaire, émigré à Jersey, revint dans la nuit du 9 au 10 juin 1794 pour présider la procession nocturne de Gonfreville. Cette manifestation exalta la fureur du commissaire Le Carpentier qui fit aussitôt arrêter dix membres du comité de surveillance de Coutances. Emprisonnés à Périers, et heureusement oubliés dans leurs prison, ils furent libérés plus tard, grâce au bienveillant jugement de Le Menuet de la Jugannière, alors accusateur public près le Tribunal criminel de la Manche.
             Mais trois jours après leur arrestation, Le Carpentier expédia au tribunal révolutionnaire de Paris les 24 personnes qui composèrent " la fournée de Coutances ", (juste avant la fin de la Terreur).

            Parmi elles se trouvèrent Sorin de l'Espaisse, Marie-Léonor de Cussy (Marie-Léonor de Cussy-Mandeville, grand vicaire et maire de Coutances) et son neveu Louis-Léonor, Hue de Caligny et François-Léonor de Mons, grand vicaire de l'évêque exilé de Coutances, parfaitement innocent de toute compromission dans cette affaire et que ne purent sauver les protestations qu'élevèrent en sa faveur les autorités républicaines elles-mêmes. Ils furent jugés en masse. Fouquier-Tinville aggrava à plaisir les charges plus ou moins vagues, relevées contre ces malheureux, accusant personnellement d'émigration ceux dont les parents seuls avaient émigré, d'intelligence avec l'ennemi ceux qui n'avaient pas la moindre relation avec l'étranger, de provocation à la guerre civile... et leur faisant un crime de s'être apitoyés sur le sort du tyran Capet. Des 24 accusés, 5 seulement furent acquittés. Tous les autres furent condamnés à mort le 3 thermidor (21 juillet 1794), exécutés le jour même à la barrière de Vincennes et inhumés au cimetière de Picpus.}

 

Adrien de Lépesse, se fixa à Vierville où il fut à deux reprises porté au conseil municipal. Il mourut "presque subitement" le 28 avril 1858. Il laissait un fils et une fille; son fils Henri de Lépesse était à cette date maire de Vierville. Il acheta le Vaumicel en 1859.

Henri Sorin de Lépesse, déja héritier de Vierville, se rattachait par sa femme aux anciens Seigneurs du Vaumicel et de Vierville.

Il avait, en effet, épousé en juin 1849 Aglaë-Siméonide-Justine Wastelier d'Hailliecourt, fille de Jean-Baptiste-Justin et de Louise-Nathalie (ou Léonie??) Couliboeuf de Blocqueville (Les Couliboeuf blasonnaient d'azur à la tête de bœuf d'or.). Celle-ci était fille de Aglaë-Marie-Thérèse Morin de Litteau, elle-même fille de Françoise de Marguerye, elle-même fille de Gilles-Edouard de Marguerye (1709-1802) qui avait été à la fois seigneur de Vierville et du Vaumisset (voir plus haut).

Les Marguerit de Rochefort - Goussancourt, propriétaires de 1879 à 1882

En 1879, après la mort de Henri Sorin de Lépesse, le château fut acheté par le comte de Goussancourt, époux de Mlle Marie Noëmi de Marguerit de Rochefort (dont la grand-mère avait déjà fait pareille acquisition en 1809) du manoir de Than. Il vint alors pour la seconde fois dans la famille de Marguerit de Rochefort, et Vierville était à nouveau réuni à Than pour quelques années (de 1879 à 1882).

C'est probablement les Goussancourt qui modifièrent le château: construction de la tour d'angle à la place d'une portion d'aile disparue, modification des lucarnes de la façade Nord, etc.. et qui firent exécuter le blason qui se trouve sur l'aile Nord-Est.

En 1882, le comte de Goussencourt en céda la propriété à M. Lefrançois, fils d'un avocat de Bayeux et ingénieur des mines de Littry, puis des chemins de fer du Nord de l'Espagne et du Portugal.
Monsieur Lefrançois est en particulier à l'origine des travaux de terrassement (voir le plan de 1882) qui ont beaucoup amélioré la vue de la mer depuis les pièces principales du château. Après sa mort, Mme Lefrançois dut vendre en 1906 sa propriété et les précieuses collections d'objets d'art, de meubles et de tapisseries que son mari avait rassemblées dans le château de Vierville (il y reste cependant de très beaux panneaux d'azulejos).

En 1906-1910, deux propriétaires successifs, étrangers au pays, n'y virent qu'un objet de spéculation, et la propriété fut rachetée en 1910 par la famille Hausermann. C'est toujours aujourd'hui une belle demeure entourée d'herbages et d'un parc très boisé.

 

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